* Ceux qui traitent des parties hors contexte *

Toujours dans ContreTemps, Michael Löwy, traite de la « question nationale » dans la Révolution, article déjà paru en 1997, dans Critique communiste. Il y s’agit de montrer que Lénine et Trotsky ont violé, au moins  deux fois de manière évidente, en laissant de côté (dommage !), les « conditions plus ou moins discutables de la “soviétisation” de l’Ukraine et des nations caucasiennes ». Les deux évidentes sont « l’invasion de la Pologne en 1920 et celle de la Géorgie en 1921. »


 Pas  besoin de quatre pages pour lui faire remarquer que : 1/ que la guerre défensive victorieuse contre la Pologne du maréchal Pilsudski, qui avait envahi l’Ukraine soviétique (voir plus haut), ne fut poursuivie brièvement au-delà de la frontière polonaise, contre la volonté du chef de l’Armée rouge, Trotsky, et ne fut donc pas une invasion, mais une tentative de provoquer une révolution polonaise, qui n’était pas prête. Seule la manière de présenter les choses renverse la première exception. 2/ Le texte de Löwy ne nous apprend rien  des opérations d’invasion de la Géorgie opérées par Staline dans le dos de la direction bolchevique, qu’il mit devant le fait accompli, malgré les résistances de Lénine, presque à la veille de sa mort, qui accorda son soutien à Mdivani, dirigeant des Géorgiens hostiles à l’absorption de leur État. Trotsky, trompé un moment sur les faits, en partagea la condamnation. Löwy fait donc un faux procès aux deux principaux dirigeants du pouvoir soviétique. Pourquoi ?


C’est qu’il cache d’autres désaccords, que l’on trouve dans d’autres de ses ouvrages, derrière les « principes » de la question nationale, qui viennent in fine (d’ailleurs, selon lui, bien fondés par Staline dans son ouvrage de jeunesse sur la question, et insiste-t-il, sans la moindre intervention de Lénine).
Ainsi, comme co-auteur avec Olivier Besancenot, leurs Affinités rouges et vertes ont conduit leur « démocratisme » à l’exigence d’unité avec les anarchistes (dont toute l’activité fut contre révolutionnaire), en particulier en célébrant contre le pouvoir bolchevique leur cher Makhno, qui ne cessa de trahir ce pouvoir, après des accords conclus avec Lénine lui-même. Autre  accusation « démocratique » : le caractère autoritaire de l’Armée rouge, à la place de laquelle il aurait fallu une armée de milices, ce dont ils ne voyaient pas le ridicule, opposée aux armées de métier du monde entier. Plus, naturellement le mythe de Cronstadt, petite ouverture au stalinisme à venir. Voilà bien les plus pauvres des révisionnistes.


Terminons pour aujourd’hui, avec l’Histoire du Goulag  de Juliette Cadiot et Marc Élie. Rien à voir avec le Centenaire, puisque les auteurs l’étudient de 1930 à 1952/1954, soit comme phénomène purement stalinien. Certes, Henri Wilno précise, à la fin de l’analyse du livre, que « Les auteurs ne cèdent pas à des raccourcis qui les amèneraient, par exemple, à soutenir qu’Octobre débouchait inéluctablementsur les camps. » Cet  inéluctablement  est de trop, bien qu’en poursuivant : « Pour ceux qui se refusent à assimiler stalinisme et socialisme, un bilan sans concession des camps est une nécessité. » Car en effet, les camps qui existaient pendant la période révolutionnaire n’étaient pas très différents de notre bagne de Guyane de l’époque. On en sortait après le temps de condamnation achevé.

Passons à Internet qui nous livre tout, sauf Michel Lequenne, classé par quelques-uns comme de l’ « orthodoxie trotskiste », alors qu’il est seul à dépasser…ce que Trotsky ne pouvait savoir  quand il fut assassiné.

Je ne suis pas un spécialiste de la Russie et de l'URSS. Mais, communiste et historien du communisme français, je ne pouvais pas me dispenser d'un regard sur ce qui fut si longtemps un modèle. J'ai donc choisi le genre de ce que les anglo-saxons appellent un "essai", pour dire ce que je retenais personnellement d'une bibliographie prolifique. La plus grande partie de l'ouvrage est consacrée à ce regard. Et on comprendra aisément que mon point de vue tourne autour de la question des questions : ce qui est advenu après 1917, et notamment le tournant stalinien, est-il ou non la conséquence inévitable du choix de cet automne flamboyant ? Le stalinisme est-il ou non la vérité du communisme ? Ou suffit-il de dire qu'il en est une perversion ?

06/11/2017

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