* Ceux qui auraient fait mieux *

Ne quittons pas ContreTemps pour rencontrer un type de critiques de la Révolution d’Octobre qui semblent les plus à  même d‘en parler, puisque se réclamant toujours de la Quatrième Internationale, tout en en ayant dissoute la Section française, et donc, en principe, de Trotsky, mais qui, tout de même, déplorent les erreurs des dirigeants de cette Révolution. Ce sont ceux qui, s’ils avaient été là,  ne les auraient donc pas commises.

Charles Michaloux et François Sabado sont de ceux-là. Une page et demie pour un accord total jusqu’aux années 20. Dix ans, c’est trop ! La Révolution a duré moins. Il faut les prendre une à une. Il faut toute l’année 20 pour que la guerre se termine, victorieuse dans un pays ruiné, détruit, une grande partie du parti, la meilleure sans doute, tombée sur les champs de bataille. M. et S. repartent en leur troisième page : Coup d’État ou insurrection ? La question n’est-elle pas réglée pour nous depuis longtemps, de par la définition même de « coup d’État ». Le Parti bolchevik n’était pas dans l’État, il le détruisait à la tête des Soviets et des troupes entrés en révolution.

Mais voilà où nos critiques rappellent que les bolcheviks étaient minoritaires dans le Congrès (mot oublié) des soviets. L’appel à un gouvernement en commun avec les mencheviks et le socialistes-révolutionnaires n’allait plus être possible, une fois le pouvoir prit, et que son programme radical proclamé ne fut plus acceptable pour eux, sauf pendant peu de temps, avec quelques S.R.

Mais les soviets, c’est eux qui devaient désigner le pouvoir, s’écrient nos bolcheviks démocratiques. Certes Trotsky a apporté la réponse avec le  Comité militaire révolutionnaire, représentation, certes  militaire, mais du peuple de Petrograd. Astuce pour nos critiques qui voient le mal fondamental fondé par un tour de passe-passe, où c’est le Parti qui devient l’État, en en subordonnant toutes les instances. Les circonstances ont beau dos !

En vérité, la démocratie soviétique exista dans les débuts de l’État socialiste. Nos Amis auraient bien fait de lire la partie « Le Chaos », et ce qui suit le chapitre sur le Traité de Brest-Litovsk dans ma Contre-Révolution dans la Révolution. Tous les partis fonctionnaient, avaient leur presse, leurs meetings, leur recrutement. Et ce n’est pas la faute du pouvoir si les anarchistes le violèrent (ledit pouvoir sachant faire la différence entre ses différents courants), ni si c’est une militante de la cellule terroriste du parti SR qui faillit tuer Lénine, ce qui sauva Trotsky. Par ailleurs, la discussion était libre dans le Parti lui-même, et elle fut même dramatique, avec Boukharine pour sa tendance de gauche, pendant les discussions sur ce qui se passait à Brest-Litovsk.

Mais il y a pires erreurs de Lénine et Trotsky. D’abord le « terreur rouge », avec  oubli qu’elle n’a été décidée que pour réagir à la  « terreur blanche ».  

Puis un grand saut : « Une fois la guerre gagnée… ». Et c’est : « Le soulèvement des marins de Cronstadt. »  Voilà un article de foi dans feu la LCR. Qu’on retrouve ici, sans même  la « tragique nécessité » admise par Victor Serge et Rosmer, tous deux présents sur  les lieux, ni le fait énorme que, de ces marins, il n’y avait plus un seul de ceux de 1917, mais des marins de la Mer noire, presque tous ukrainiens, ralliés après avoir combattu l’Armée rouge. C’est cette répression, qui a été « injustifiable » pour nos donneurs de leçons.

Pas un mot sur le fait que Lénine avait été averti de l’annonce de l’insurrection à partir de Paris, et qu’il cherchait quel pouvait être un agent blanc sur l’île. Mais nos deux Amis avaient de quoi en savoir plus que lui, puisque Pierre Frank avait publié aux Éditions de la Taupe rouge, qu’ils doivent connaître, le Memorandum sur la question de l’organisation  d’un soulèvement d’un soulèvement à Cronstadt, découvert par le Prof. Avrich, dans les archives secrètes des Affaires étrangère des USA.  Certes Pierre Frank n’avait pu que donner les documents Avrich à l’état brut, mais qui contenaient déjà le nom du futur dirigeant de l’insurrection : Petritchenko. Il m’a été possible de les décortiquer, ces documents, et les mettre en rapport avec nos propres sources historiques. La seule circonstance atténuante de nos deux amis, si  c’est une, est d’avoir ignoré mon livre, écrit il y a des années. La faute à qui ? 

Si l’interdiction des tendances organisées et des fractions dans le Parti, dans la crainte de son explosion, fut une erreur, reconnue trop tard, n’est-il pas monstrueux d’y trouver une explication de la facilité à préparer à la contre-révolution stalinienne, candidement nommée « mettre le Parti en coupe réglée », et presque in fine : « Certes, il y a des éléments de continuité entre l’époque léniniste et la  réaction (sic) stalinienne, mais les discontinuités (sic) et les ruptures (sic) l’emportent largement. » Voilà nos « trotskistes » sur les positions de Zarka et Martelli.

La responsabilité générale de la défaite de la Révolution en revient à la direction bolchevique elle-même, pour son manque de démocratie, étudiée au nom des principes, et nom du chaos entre révolution et contre-révolution, toujours présente. ;

D’où : « Le pouvoir : le prendre, le garder, toujours ? » Conclusion : La continuité d’Octobre a été rompue (sic). « Et maintenant qu’elle l’est, il faut absolument voir clair dans ce qui s’est passé, et pour que le cours des choses puisse être différent à l’avenir, quand la révolution se remettra à l’écrire. »

Attendons donc qu’elle vienne. iNous avons là maintenant  des théoriciens qui sauront la diriger convenablement en toute démocratie.

03/11/2017

Réagir

Aux débats